Il est primordial, dans notre profession, de porter une attention particulière aux détails. Une décision récente de l’OEB, T 0353/18, illustre ce qui peut se passer lorsqu'une divergence apparaît entre la version au propre et la version annotée d'un jeu de revendications modifié, et confirme qu'il n'y a pas de primauté juridique d’une version sur l'autre.
L'affaire concerne un recours formé par un opposant contre une décision de la division d'opposition portant sur le maintien du brevet européen EP1957579 sous une forme modifiée. Au cours de la procédure orale de recours, une divergence est apparue entre la version au propre et la version annotée d'une requête auxiliaire soumise précédemment. L'opposant (appelant) était parti du principe, pour son travail, que la version au propre et la version annotée étaient identiques et avait donc préparé son dossier uniquement à partir de la version annotée. Interrogé par la commission lors de la procédure orale, le titulaire (requérant) a déclaré que la version au propre était la version valide et a confirmé que la divergence était due à une erreur lors de la préparation de la version annotée. La divergence entre les deux versions avait trait aux quantités de deux composants spécifiques présents dans la composition du revêtement revendiquée, ce qui constituait un élément central des objections de l’appelant au titre de l'article 123(2) CBE.
La chambre n'a pas mis en doute le fait que les deux parties avaient agi de bonne foi. Néanmoins, elle a souligné « qu'il n'existe aucune disposition de la CBE établissant une quelconque primauté juridique de la version au propre sur la version annotée d’une requête, ce qui signifie que, si elles sont différentes, seule une déclaration du titulaire peut déterminer quelle est la version valable ». Cependant, la déclaration n'a pas été fournie avant la procédure orale de recours. La chambre a donc jugé que l'appelant pouvait supposer que la version annotée était correcte jusqu'à ce moment-là et qu'il ne devait pas subir un quelconque préjudice du fait d'avoir agi ainsi.
Comme il n'y avait eu aucun échange d'arguments préalable entre les parties concernant la version au propre de la requête auxiliaire, par exemple en lien avec l'article 123(2) CBE, la chambre a décidé qu'il existait des « raisons particulières » au sens de l'article 11 du RPCR (Règlement de procédure des chambres de recours) 2020 justifiant le renvoi de l'affaire en première instance pour poursuivre la procédure.
Cette affaire rappelle aux deux parties à la procédure qu’elles doivent s'assurer que la version au propre et la version annotée correspondent entre elles. Même s’il est finalement possible de corriger les erreurs commises de bonne foi, le temps et les coûts qu’implique une telle erreur peuvent générer des surcouts non négligeables.
